Dans son action d’observation de l’évasion fiscale, l’observatoire européen de la fiscalité a fait le constat d’une faible imposition des milliardaires à travers le monde. Dans cette optique, un impôt minimum mondial de 2 % sur les 13 000 milliards de dollars que détiennent environ 2 700 milliardaires de la planète est proposé. Malgré le fait que ce pourcentage est statistiquement minime, sa réalisation donnera lieu à des bénéfices économiques considérables pour les finances des États. On fait le point.
La problématique de l’évasion fiscale s’est retrouvée au centre des préoccupations d’une centaine de chercheurs à travers le monde. Ces acteurs sont affiliés à l'Observatoire européen de la fiscalité. Leur intérêt s’est particulièrement porté sur la taxation des entreprises multinationales ainsi que des individus les plus riches au cours de la dernière décennie dans l’ensemble des gouvernements à travers le monde. Mettant en lumière une moindre imposition des milliardaires évoqués, la proposition d’application d’un taux d’imposition minimum de 2 %, sur les 13 000 milliards de dollars de richesses détenues par les 2 700 milliardaires de la planète a été avancée par l’observatoire. Si le nombre de ces personnalités fortunées atteint la quarantaine et plus précisément 42 en France, il s’élève à 499 pour l’ensemble de l’Europe.
« L’évasion fiscale offshore a été divisée par trois en moins de dix ans. » Cette réalité est en tout premier lieu une des bonnes nouvelles à propos de laquelle les États peuvent se réjouir. Cela signifie concrètement que le pourcentage du patrimoine qui échappe à l’impôt a connu un recul considérable qui correspond plus exactement à 25% de celui-ci si l’on fait la comparaison avec les chiffres y afférentes pour l’année 2013.
Bien que les paradis fiscaux continuent d’accueillir les milliards d’entreprises et particuliers fortunés, cette évolution est d’ores et déjà grandement appréciable. « Une quantité persistante de bénéfices continuent d’être délocalisés vers les paradis fiscaux, atteignant 1 000 milliards de dollars en 2022 », cela est toutefois un constat que l’on ne peut encore ignorer. A titre de comparaison, cela correspond à un tiers de l’ensemble des bénéfices que les entreprises ont enregistré en dehors de leur pays d’origine. En outre, bien que les efforts politiques tentent de lutter contre cette pratique fiscale, l’on ne peut pas dire à l’heure actuelle que le transfert de bénéfices a pris fin.
Le rapport a permis de renseigner sur les taux d’imposition extrêmement faibles qui sont appliqués à l’endroit du patrimoine des milliardaires du monde entier. Pour cause, ces taux se situent dans l’intervalle compris entre 0 % et 0,5 % des patrimoines en question. A noter que la qualification d’impôt personnel fait référence aux impôts sur le revenu individuel et sur la fortune, dans les pays où ils sont prélevés.
Cette habileté fiscale nécessite une certaine astuce de la part des milliardaires. Ces derniers ont en particulier la possibilité d' utiliser des sociétés personnelles de détention de patrimoine, aussi appelées holding familiale, dans de nombreux pays ». Cette pratique est valable dans l’hexagone. Ainsi, les fortunes s’abstiennent de percevoir leur rémunération à titre privée pour éviter que leurs revenus soient imposés suivant le barème de l’impôt progressif. Ce dernier est en effet celui qui s’applique aux particuliers (taux d’imposition pouvant aller jusqu’à 45 %). Au lieu de ça, ces milliardaires choisissent de rattacher leurs dividendes dans leur holding et pour que leurs fiscalités en soient largement réduites.
La mise en place d’un impôt minimum mondial des milliardaires, voilà la base de la proposition. Cet impôt minimum devrait représenter 2 % du patrimoine des individus visés. Cela permettrait de « récupérer ». Pas moins de 214 milliards de dollars, ce qui équivaut à 201 milliards d’euros en seraient ainsi récoltés. Cela correspondrait à la contribution de 2 700 individus. Les auteurs du rapport affirment que « Le nombre de contribuables concernés est très faible, et le taux d’imposition (2 %) modeste » mais « le potentiel de revenus est élevé en raison de la concentration de la richesse ».
Par ailleurs, le rapport a informé sur l’augmentation de la richesse des milliardaires mondiaux. Une hausse moyenne de 7 % par an a ainsi été enregistrée depuis l’année 1995. Bien qu’elle ne prétende pas « éviter la fraude fiscale » une compensation en résulte d’après le chercheur associé à l’IRIS, Eric Vernier, qui est spécialiste du blanchiment de capitaux, de la fraude en entreprise.
La mise en œuvre de cette action revêtant un caractère international et coordonnée à ce niveau en vue de la taxation des milliardaires pourrait prendre un certain temps et notamment des années. Le directeur de l’observatoire européen de la fiscalité, Gabriel Zucman se montre cependant optimiste en disant : «Ce que beaucoup pensaient impossible, nous savons aujourd’hui que c’est possible». Il veut en fait rappeler l’existence de l’accord international conclu en 2021 entre 140 pays. Pour information, celui-là instaurent un taux d’imposition minimum mondial de 15 % sur les sociétés. Eric Vernier se montre quant à lui plus dubitatif par rapport au sujet :« Cet impôt sur les milliardaires sera sûrement compliqué à mettre en place car il est difficile de cerner l’ensemble de leur patrimoine. Et dès que l’on met en place quelque chose de nouveau, une stratégie fiscale d’évitement se met en place. Et qui prélève ces 2 % ? Qui en bénéficiera ? ». Ces questionnements viennent ainsi manifester ses doutes sur cette solution.
Son envie de créer un « groupe de travail transpartisan » chargé de la réflexion sur l’imposition internationale des particuliers a été annoncée par le ministre français délégué aux Comptes publics Thomas Cazenave. Le gouvernement pour sa part est d’avis qu’un prélèvement de cette sorte doit être porté au niveau européen ou international. Cependant, on connaît déjà certains millionnaires qui se montrent favorables à cette proposition ! En effet, plus de 200 millionnaires, issus de 13 pays différents, demandaient en janvier aux dirigeants du monde entier d' être davantage taxés. Six mois après, dans une lettre publiée mardi 5 septembre, environ 300 millionnaires ont réclamé aux dirigeants du G20, de lutter contre l’évasion fiscale, se traduisant par la soustraction au paiement des taxes.